jeudi 21 mars 2013

Educateur et parents

Je participe depuis peu à des rencontres avec des parents en dehors de mon cadre professionnel. Je voulais avant tout, comprendre la vision des parents, leur optiques et leurs désirs et détruire mes idées reçus afin d'être au plus proche de leurs attentes.

Ce qu'il en ressort c'est que nous sommes à des années lumières. Nous avons les connaissances techniques, nous ciblons les besoins et les attentes de nos résidents, nous attendons, projetons parfois leurs attentes et leurs besoins.

Les parents espèrent le meilleurs pour leurs enfants, qu'ils soient au plus proche de "l'enfant pas handicapé" avec les mêmes chances et les mêmes savoir.

Et tout le monde a tord et tout le monde a raison

De ces constations, ressortent les lois 2002-2 et l'insertion des enfants dans les écoles classiques et des adultes en milieu normés.

La complexité de la situation est qu'il n'y a pas de vrais solutions. Il y a des enfants qui pourront aller très loin dans une scolarité normale, d'autres non. C'est la même injustice que dans les milieux sans handicap. Certains intégreront les IME à 8 ans d'autres à 14. Certains feront cagne et hypocagne pendant que d'autre feront un CAP petite enfance. Et il n'y pas de mieuc ou de moins bien ce sont juste des chemins de vie différents.

Ce qui m'inquiète le plus c'est que les structures spécialisées soient vu comme des enfermements et des voies de garages. 

Je ne dis pas que c'est un choix facile et rassurant de voir son enfant intégrer ce genre de structure, mais je sais aussi que je connais des IME qui font un travail fomidable, avec des suites d'apprentissages de l'école et une préparation au mieux pour que, au plus vite ils intègrent des ESAT et puissent y faire leur vie.

C'est d'ailleurs très curieux que les équipes éducatives aient du mal à entendre cette peine des parents à quitter le monde classique. L'abandon de l'espérance est difficile à admettre. Comme si on ne leur faisait pas confiance, ou qu'on mettait leur travail en péril. Un parent cherche juste à petre rassuré quant à la prise en charge de son enfant.

Et par ailleurs, je trouve toujours choquant que dans les formations pour les futurs enseignants, il n'y ait pas de volet sur l'accueil des enfants handicapés... Non seulement, les avs ne suffisent pas, mais en plus on met en difficultés les classes et les instituteurs qui ne sont pas formés à un type d'enseignement différents. 

Il n'y a pas de bonnes solution. Mais je crois que les IME, pour beaucoup sont des structures adaptées et elles ont le mérite d'exister quand il n'y a plus de solutions. J'ai des jeunes qui ont été broyés par le systèmes scolaires, parce qu'on les a obligé à se soumettre à une règle de normes. Et d'autres qui ont créé de vrais amitiés qui continuent aujourd'hui dans les structures en tant qu'adulte.

La seule chose que je sais c'est qu'il n'y a pas de règles.

Et je conclurais par le fait que la règles est pourtant la même pour tous: s'il y a autant de parentalité qu'il y a de parents et d'enfants, il n'y a pas d'autres règles dans le monde du handicap.

Pour apprendre à être la mère de ma fille, je l'ai écouté, je me suis écouté et j'ai fais comme j'ai pu. Faites pareil avec vos enfants, handicapés ou non.


mercredi 20 mars 2013

Tous ensemble

Hier après-midi, nous faisons des recherches d'image pour illustrer les articles du journal de la résidence quand on tombe sur cela:



Europe 1, les journaux en ligne, tout le monde en parle, le montre. Oui! Là sur la première page des journaux enfin! Des adultes trisomiques, en situation de handicaps, des "pas comme il faut" comme  dit la chanson, pas tous actif, certain parfaitement inactif, mais ils sont là. Ils font tous quelque chose pour ouvrir l'institution. Tout est à l'image de ces institutions où, parfois, être assis avec le groupe c'est déjà faire quelques chose.

Bien sur, je ne suis pas dupe. Si Jean-Jacques Goldman n'avait pas fait son apparition, personne n'en aurait parlé. Mais peu importe, ou plutôt si! Justement! Si quelqu'un de célèbre se montre à leur coté, les traite comme tout le monde alors on va pouvoir s'identifier, comprendre qu'il n'y rien de malheureux à être différent.

Au delà de leur combat pour trouver des sous, l'Arche est une association qui a pour but de ne pas occuper les personnes mais bien de les aider à faire émerger les dons et talents. La différence avec mon association, c'est que des personnes bénévoles apportent leur concours dans leur accompagnement. Et cela change tout puisqu'ils ne doivent pas apprendre à faire avec des gens qui déjà connaissent et ont appris les difficultés de leur handicap, mais bien faire avec monsieur tout le monde et donc, s'adapter eux aussi au monde extérieur.

Maintenant au delà de cet aspect des choses, je ne sais pas s'ils s'en sont rendu compte mais cette association a ouvert une porte: elle a médiatisé, tendu le micro à ceux qui n'ont jamais la parole, montrant mettant en avant que l'on n'est pas si différent des autres...

La force de la chanson je te donne qui prend tout son sens et qui met si bien en valeur tout ce que peut être, non pas le monde du handicap, mais bien le mélange, le travail de groupe dans les institutions, les associations.

Je ne peux que vous inviter à participer à cette campagne, parce que tant de talent et d'intelligence mérite d'être soutenu.

Merci, de mettre en valeur aussi ce que nous essayons de porter chaque jour.



lundi 18 mars 2013

Charles et la disparition de son papa

 Accompagner des adultes handicapés c'est aussi les accompagner dans toutes leurs parcelles de vie. Dans leur travail, leur connaissance du monde qui les entour, leur évolution, mais aussi dans leur vie affective, et parfois dans les décès qu'ils peuvent rencontrer.

Travailler en foyer de vie, c'est prendre ce risque la. Depuis que je suis arrivé j'ai due accompagner deux personnes dans le deuil de leurs parents. Parfois, on sent venir. Les familles vieillissantes, prepar « après ». Et puis, il est y a ceux qui se sentent en pleine forme, qui ne voit rien venir, qui sont jeunes. Et la mort frappe sans prévenir.

Charles vivait avec son papa. Ça se passait bien, malgré une pauvreté certaine, mais tous les deux s'accommodait  bien de la présence de l'autr. Parfois, le frère de Charles, venait leur rendre  visite. Monsieur avait une relation suivie, qui ne voulait pas imposer à son fils alors il avait décidé avec sa compagne de ne pas vivre ensemble.

Et puis un maton monsieur ne s'est pas réveillé. C'est Charles qui a trouvé son père mort. Il a attendu que sa compagne arrive, et puis il a fallu commencé le deuil. Mais surtout la préparation à l'après...

Par chance, Charles et son papa avaient tout préparer ensemble: son départ en internat, la succession, la prise de a tutelle par son frère. Car du jour au lendemain, Charles a quitter sa maison, est partit pour un foyer d'urgence (son frère ne pouvant pas l'accueillir) et ne nous a jamais revu. Aujourd'hui il a intégré un ESAT et il parait que ça se passe relativement bien.

Je trouve ça dingue, qu'en France, rien ne soit mis en place pour que les personnes ayant leur repères dans un lieu d'accueil d'est pas de solution transitoire pour pouvoir faire le lien entre leur ancienne vie et leur nouvelle vie. N'importe lequel d'entre nous ne supporterais pas d'avoir à quitter sa maison d'une minute à l'autre, son lieu de travail, pour une vie inconnue, un monde qu'il ne connait pas. 

Mais les personnes déficientes intellectuelles peuvent tout supporter... tout accepter...

Elles n'ont pas le choix. Et personne ne se soucie de savoir si c'est humain ou non. Quand on aborde le sujet en réunion, on nous fit "il y a déjà des solutions, ce n'est pas vrai pour tout le monde!!!"

C'est sur... Comme il y a pire ne te plains pas...

Si tu n'as rien à manger au 15 du mois, ne te plains pas, au Soudan, ils n'ont rien à manger tout court...

Je suis dépitée, et cela de plus en plus par le manque de solution, d'attention, de recherche envers les personne en situation de handicap mental. Que ce soit les adultes qui ne sont pas autonomes, les enfants qu'on n'accepte pas dans les classes faute de moyen et de formation...

Le handicap intellectuel est la part pauvre du  handicap...



vendredi 15 mars 2013

L'assistance sexuelle... Pour ou contre...

 Avant de commencer et qu'on ne me prête des attentions qui ne sont pas les miennes, je tiens à vous dire que je ne suis ni pour ni contre, bien au contraire.... Vous trouverez une somme de question que je me pose sur le débat, et qui m'empêche de dire oui, sans réfléchir...

Ce soir, je discutais tranquillement, sur face de bouc quand je vois passer un statut qui m'interpelle...

Un des sujets de ce soir: "Faut-il autoriser l'assistanat sexuel aux personnes handicapées?" Je ne comprends même pas qu'on puisse poser une telle question!!
 
Et bien moi, j'ai pleins de choses à dire sur le sujet! Et je trouve que justement il y a pleins de questions à poser. D'abord l'assistance sexuelle, toute assistance sexuelle qu'elle est, arrêtons de nous cacher derrière notre gros pouce, ce n'est ni plus ni moins que de la prostitution légale. Alors certes, c'est pour la bonne cause mais la servitude d'un être pour pour un autre, moi ça me pose quand même question, tout handicapé qu'il est.

Oui je suis un peu bonne mère la morale, mais il est quand même question de sous contre un acte sexuel.

Et puis il y a une question de sous.  Soyons cru mais entrons dans le sujet. Le prix d'un acte sexuel tarifé (oui, une pass, en vrai soyons pas bégueule hein!), si on ne compte pas les escortes c'est environ 80 euros. Quand tu sais que les AAH sont de 780 euros, bah va falloir les sortir les 80 euros pour ton assistante sexuelle. Alors quoi? On va le faire rembourser par la sécu???

Donc si tu es handicapé physique, ayant touché un joli héritage, tu peux te payer une pute sinon tu es bien gentil, tu prends ta main gauche et tu patientes...

Encore une fois, ce qui me dérange le plus ce n'est pas le fait qu'on réfléchisse sur comment offrir une sexualité aux personnes handicapés mais comment leur donner accès à l'amour (Sainte Bernadette sort de ce corps...)

Je comprend bien que la frustration, l'enfermement c'est terrible, j'en suis témoins tous les jours. Mais les "condamner" à cette sexualité, en présupposant que personne ne pourra les aimer suffisamment à cause de leur handicap, je trouve ça encore plus insultant. Et en plus comme on n'est même pas capable de reconnaitre que nous sommes les vrais coupables dans cette affaire. Parce si on en arrive là, c'est aussi parce que le désir sexuel ne peut se faire dans notre société que sur un corps valide et désirable. Alors un corps incomplet, moche, atrophié, on se dit "il y a bien une nana qui va vouloir le faire contre de l'argent...", parce que nous, on ne se verrait pas aimé un corps ainsi fait.

On se pose là, en être ouvert et tolérant, donnant droit à untel de coucher avec Simone contre de l'argent, parce que nous, femmes savantes, nous n'avons pas le courage de désirer ces hommes. 

Aujourd'hui, si ces hommes réclament un acte sexuel tarifé, c'est parce qu'il vivent dans une misère amoureuse donc sexuelle. Parce ce que rien n'est mis en place pour aider, favoriser les rencontres et les amours de ceux qui vivent l'enfermement... 


Commençons par les regarder comme des hommes désirables et indifférents des valides. Commençons par nous intéresser à leur vie, leur pensées, leur désir avant de prendre nos mines dégoutés devant ces corps meurtris et abimés. Commençons par aller les voir, les rencontrer, les trouver cons, formidables, détestables, charmant ou mufles. Et arrêtons de donner des leçons tout autour de nous alors que nous provoquons chaque jours des situations qui créé la misère humaine.

Et c'est mon pavé très en avance pour la mère Cane...






 

mardi 12 mars 2013

Claire

4ème jour de vacances


Claire est trisomique.


Une vie rangée  dans un foyer.

Claire ne parle pas beaucoup, voire pas du tout. Mais c'est aussi parce que personne ne lui raconte de choses intéressantes...

Claire au centre, elle aime bien Romain. Des fois il se cache derrière le réfectoire pour se faire des bisous. Claire a 25 ans, et c'est la première fois qu'un garçon la regarde comme ça. Ça lui fait pleins de choses dans le corp quand elle pense a lui.

Claire, elle veut pas qu'on le sache son amour pour Romain. L'éducatrice, elle ne parle jamais de ces choses la et sa maman, elle comprendrait pas tout cet amour.

Des fois, la nuit, romain il vient lui faire des câlins dans sa chambre. Ou c'est elle qui le rejoint. Mais elle aime mieux quand c'est lui parce qu'il faut traverser l'étage des filles, passer devant la chambre de garde, sortir, descendre à l'étage des garçons, et tout ça, ça lui fait un peu peur.

La nuit il se font des bisous et des câlins. Ils se font des caresses qui font du bien... Et quand ils ont fini, Romain il retourne dans sa chambre, pour pas que les éducateurs sachent.

Depuis quelques temps tout le monde regarde Claire bizarrement. Romain ne vient plus la voir dans son lit parce que les éducatrices rôdent dans le couloir la nuit. Claire est tes fatiguée et a beaucoup grossi. Surtout du ventre. Elle e toujours très faim faut dire. Mais c'est pas comme si elle avait trop mangé. Des fois son ventre bouge tout seul. Claire ça lui fait très peur mais elle ne pose pas de question... Et personne ne lui explique rien. Elle a rencontre pleins de docteurs qui parle de bébé, de fœtus... Sa maman pleure beaucoup, pendant que le docteur regarde son zizi. Parfois même, il regarde une télé, qu'il tourne  vers lui avec un air grave. Mais Claire ne sait toujours pas ce qu'il regarde.

La semaine dernière, sa sœur Michelle est venue. Sa maman et elle se sont disputée. Michelle est partie en disant qu'elle devait savoir et sa maman disait qu'elle n'y comprendrait rien.

En vrai, Claire a compris que Romain à mis un bébé dans son ventre. Et sa maman est très en colère parce qu'elle pense que Claire n'était pas d'accord. C'est pour ça que Romain est partir du centre. C'est pour ça qu'elle ne le reverra plus jamais.

Le lendemain, Claire n'est pas aller au centre non plus. Sa maman, l'a emmené à l'hôpital. Il y avait le docteur du zizi, qui faisait des sourires.  Il lui a demandé de prendre une douche, puis d'enfiler une robe de chambre. Puis on l'a mis sur un chariot comme au supermarché. Et on l'a emmené dans une salle toute froide.

Puis elle étai très fatiguée, alors elle s'est endormie.

Quand elle s'est réveillée Claire n'avait plus de bébé dans son ventre mais juste une grosse douleur....

Quand elle est sortie de l'hôpital, le médecin  a dit a sa maman: "pour elle ça ne veut rien dire...elle oubliera."

Mais elle n'a tellement pas oublié Claire, qu'elle a arrêté de manger. Un jour au centre , l’éducatrice  elle était tellement triste, qu'elle a dit a sa maman que c'était plus la peine qu'elle vienne au centre. Depuis, elle est assise dans un fauteuil a la maison et elle regarde des dessins animés toute la journée. Ça lui évite de se souvenir. Mais comme elle ne parle pas Claire, personne n'a jamais compris pourquoi elle est si triste...

Cette histoire est vraie de bout en bout. Elle fait partie des histoires vraies qu'on m'a envoyé. C'est Michelle, la soeur de Claire qui me l'a envoyé. Très fâchée contre sa maman, elle ne la voit que pour avoir des liens avec sa petite soeur. Cette histoire s'est passé en 2008. Claire a été avorter de force à 7 mois et demi de grossesse. Rien ne justifiait cette avortement si ce l'est l'état de la maman.





dimanche 10 mars 2013

Quelques témoignages et beaucoup d'émotion

3eme jours de vacances

Suite à la publication de ma lettre à Libé, j'ai espéré qu'ils viennent m'en demander un peu plus (grande naïve que je suis...). Seulement, faut pas déconner, les trisomiques, ça n’achètent pas de journaux vu que ça ne sait pas lire.

Mais la surprise ne vient pas de là, mais du nombre de mail, MP, messages privés que j'ai reçu pour me remercier. Tout à coup je me suis sentit tellement moins seule! Des familles, des mères, des sœurs, qui m'écrivaient pour me dire merci parce qu'elles se confrontaient aux mêmes problèmes que j'avais pu rencontrer.

Il y a longtemps, j'ai rencontrer la grande metteur en scène Ariane Mnouchkine. Un peu muet face à son talent, je n'arrivais pas à lui décrocher un mot... Et puis tout à coup je lui dis "Vous ne savez pas quelle honneur c'est pour moi de vous rencontrer aujourd'hui"
Et puis elle m'a regardée avec ses yeux bleues, et m'a dit cette chose sublime: "Chaque rencontre pour moi est un honneur. C'est moi qui ai beaucoup de chance de vous rencontrer"

Hier, en lisant tous ce messages, j'ai ressenti très profondément cette phrase. La confiance que me faisait ces gens pour me raconter leurs histoires, à travers une lettre, j'étais très émue...

Parmi ces lettres, par exemple, il y a l'histoire de Sandrine.

Sandrine a un petit frère, déficient intellectuel. Pire que les trisomiques parce que le manque d’oxygénation à la naissance, ça ne se lit pas à la naissance, tu n'as pas le droit à ta petite réflexion "Aaaaah... Ils sont pleins d'amour" avec un regard compatissant. Et oui, il y a des strates d’intégrations dans la déficience... Pas de bol, lui il a tiré la case "ça se voit pas sur mon visage...".

L'école à commencé par essayer de l’intégrer... Après 5 ans de maternelle, on conçoit de le faire passer au CP. Coloriage au fond de la classe, amuse toi petit pendants qu'on travail, nous, on n'a pas le temps de s’occuper de toi... Et puis un matin, On lui a dis qu'il allait en CLIS. Il était évident que cet enfant avait besoin d'un suivi particuliers mais non, on continue la scolarisation. Dans une classe stigmatisé par "tu as plus de mal que les autres, donc tu vas là", le pt'it gars encore plus en difficulté que les autres a fini par être le bouc émissaire. L'école c'est simple... Si tu t'intègres pas, tu te désintègres....

Aujourd'hui, il a rejoint un ESAT (foyer de travailleurs handicapés). Il y reste la semaine, rentre le week-end. Il a 22 ans, ce qui correspond sur une évolution émotionnel des personnes handicapés à 14-15 ans. Évidemment, il a beau eu passer par l'école, les structures adaptés, personne ne lui a expliqué que son corps allait changé, ce que c'était que les éjections, le désir, l'amour.... Ces gens là, n'ont pas de vie sexuelle, ce sont des enfants dans leur tête, enfin l'éduc, on te l'a jamais raconté????

Un jour, sans doute un peu dépassé par tout ça, il montre tout ça (diront-nous) en s'exhibant devant l'infirmière du foyer. Bon. Je suis pas psy, hein, mais l'infirmière, c'est quand même celle qui s’occupe du corps, qu'on va voir quand on a mal ou qu'on est malade... Donc dans sa tête, j'imagine qu'il y avait peu être quelque chose qui n'allait pas avec son corps... Enfin je sais pas mais moi, l'infirmière je trouva pas ça anodin...

Bref. Perso, moi ça m'est déjà arrivé avec une jeune fille au travail. Je lui ai dit: "Ariane, c'est pas interdit de faire ça mais c'est interdit de le faire devant tout le monde.". Je l'ai accompagnée à la douche, je l'ai aidée à se rhabiller puis ensemble, nous avons désigné un endroit où elle pouvait se cacher pour le faire si elle en avait vraiment envie... Depuis, il n'y a plus de problème.

Je sais aussi que dans beaucoup de structure accueillant des autistes, il y a carrément des salles de journées pour ça, avec tout ce qu'il faut: mouchoir, eau...

Donc, je m'attends à ce que dans cette structure connu et reconnu par le monde entier, on fasse pareil. Grande naïve que je suis.

Bah non.

Il a été invité à se rendre à la gendarmerie. Là on lui a fait un discours sur la "perversité de ses actes" et dans la mesure où les gendarmes ne pouvait rien faire de plus, il a été exclus quelques jours de son établissement. Mais attention! Si il recommence alors il sera renvoyé définitivement.

Donc, voilà le message qu'on vient de lui envoyer: "le sexe c'est mal, si t'y touches encore, tu vas devoir partir parce que tu es quelqu'un de mauvais"

Mais toujours pas de cours d’éducation sexuelle, toujours pas d'information, toujours pas de réponse aux questions....

Et si il y en a une qui tombe enceinte, il l'avorte d'office et l'empêche de revenir? A quand la castration chimique des handicapée??? Ce sera plus simple quand même!!!!

Je pars en vacances mais, si j'ai le temps, j'en profiterais pour vous raconter aussi l'histoire de Claire... Faites tourner ces pavés dans la mare, vraiment. Il faut que les choses changent...



samedi 9 mars 2013

Deficience

2eme jour de vacances

Quand on fait mon travail, il y a beaucoup de choses qu'on apprend, chaque jour est une nouvelle découverte une nouvelle réflexion.

Je crois qu'on est très en retard sur la prise en charge du handicap mental en France. Déjà on n'arrive pas à las nommer: on est passé de l'idiot du village, au déficient intellectuel. On a changé les mots mais pas le sens. Cela veut toujours dire qu'ils n'ont pas d'intelligence ou du mois qu'ils en manque.

Je ne peux me résoudre à me dire qu'ils manquent de quoi que ce soit, si ce n'est de considération, d'information, de droit. On parle de différence, d'égalité mais on les nommes des "déficients intellectuels". Déjà il y a un truc qui cloche.

L'autre soir, un parent de personne handicapé a dit à Sabrina qui m'accompagnait "Vous n'avez pas de chance déjà dans la vie alors, profitez de ce qui est bon dans la vie". Il ne se rendait même pas compte que la malchance c'est son regard qui la créait, son institution. La chance d'aimer, de vivre, de travailler, d'avoir des amis elle l'a. Et ce n'est pas parce que sa seule possibilité de vie (pour l'instant) c'est de vivre dans un foyer qu'elle n'a pas de chance...

Sabrina a un amoureux, une famille aimante, elle aime le boudin noir, Dexter, M, les dessins animés et aller à la piscine. Elle ne comprend pas pourquoi elle n'est as payé quand elle fait la cuisine pour tout le monde et rêve de vivre à coté de chez sa maman dans une petite maison avec Armand, qu'elle aime profondément. 

A 20 ans, moi j'avais un amoureux, une famille aimante, j'aime toujours le boudin noir, je regardais les Totally spice avant d'aller à la fac en prenant mon petit dej le matin, je découvrais M, et j'allais à la piscine deux heures par jour. je rêvais de vivre avec Alexis mon amoureux de l'époque... mais je voulais vivre loin de chez mes parents. Sabrina est surement plus mature que moi au même âge.

Alors quelle différence? Quelle déficience? Quelle malchance?
Un handicapé physique n'a pas de malchance parce qu'il lui manque des jambes, des yeux, des oreilles. Il s'adapte. Quand il te manque la compréhension rapide, c'est pareil tu t'adaptes.

Plus j'y pense et plus je me dis que ce blog doit aussi servir à ça. A parler d'eux.

Hier, quand j'ai écrit a lettre à Libération, j'avais envie que l'on me contact, que l'on parle enfin d'eux, qu'on vienne voir les institution des années 50 que promet la France. Je sais que je n'aurais pas de réponse, mais cette lettre a tournée, environ 500 personnes l'on lu. Et j'espère que vous allez la faire lire, en parler, pour que les gens s'interrogent sur ces invisibles.

Je ne peux pas parler pour eux, je ne suis pas eux. Tout ce que je peux vous raconter là, ce sont leurs progrès, leurs paroles, leurs confidences et ce que j'en comprends. Je me trompe peut-être sur pleins de points, mais il faut qu'eux aussi on leur donne la parole.

peu de droit, pas de considération mais sinon quelle différence?



jeudi 7 mars 2013

Lettre ouverte à Liberation

1er jour de vacances

 Ce matin la une de Libération parle du droit à la sexualité des personne handicapé. Ni une ni deux, jus d'orange à gauche de l'écran, pain au chocolat de l'autre, je saute à pied joins dans l'article... Qui une fois de plus parle de handicap physique et patati et patata....

Ah? Mais que vois-je là en bas de la page

Trééééés bien....

Cher Libé;

D'abord je voulais vous remercier pour cet article qui a le mérite d'aborder le sujet.

Mais voilà, je vais aussi parler du reste et de mon expérience, parce que dans votre sujet vous oubliez une grande part du handicap et de la sexualité. Un peu comme si vous ne parliez que de la tour Eiffel à Paris (tant qu'à parler de sexualité...)

Dans le handicap il y a ceux qui ont la parole: les handicapés physiques, les handicapés sensoriels (oui les muets ont la parole, ça marche aussi...)

Et puis il y a ceux qui ne l'ont pas, jamais, ou pour qui on parle: les déficients intellectuels. Bon, alors je reprend pour les deux du fond (et accessoirement pour tous les médias télé qui ont déjà fait l'amalgame), je ne parle pas ici d'autisme hein!!!! L’autisme est une psychose infantile. Je parle bien ici de DÉFICIENCE INTELLECTUELLE: les trisomiques 21 ou autres, les sous oxygénés à la naissance, les traumatisés crâniens, et tout ceux qui ont marché à 3 ans, parlé à 6 et à qui un matin on a dit "bon bah vous pouvez pas suivre à l'école alors zou... en IME, puis vous irez d'enfermement en enfermement".

Cette minorité là que personne ne veut voir parce qu'elle ne parait pas bien belle vu de loin je m'en occupe, je suis éducatrice.

Les personnes que nous accueillons, leur argent est confié bien souvent à leur famille. Des familles qui bien souvent nie le fait qu'ils soient adulte, alors je ne parle même pas de sexualité... Je vais vous raconter la misère sexuelle dans laquelle on les enfonce...

Quand je suis arrivée il y a quatre ans dans ma boite (j'aime bien dire dans ma boite parce que tout est toujours fermé, avec des clefs, des fois qu'ils s'échappent...), j'ai rapidement été enceinte (ceci n'a rien à voir avec mon entrée dans ma boite). Dans le même temps quelques sœurs de nos usagers ont accouché dans la même période.

Un matin, Armand est venu me voir en me demandant comment le bébé sortait. Je lui explique, mais je me dis que quand même, Armand a 26 ans, c'est curieux que personne ne lui ait jamais expliqué cela (oui, oui je suis une grande naïve). Puis dans l'institution le bruit a couru que "j'expliquais les choses".

Je les ai tous vu défiler les uns après les autres (quand j'y pense, moi aussi je devrais faire un film...) avec des questions de plus en plus poussées: "Si j'embrasse Lucien sur la bouche est-ce que je tombe enceinte?", "Comment on fait l'amour?", "C'est quoi la pilule et le préservatif?", "C'est quoi un film porno?'... Je reste dans le soft mais je vous jure qu'il y a eu bien pire. Un jour, je n'ai pas pu trouver de réponse. J'étais trop mal à l'aise face à un garçon qui me posait une question. Notre confrontation quotidienne était trop compliquée, trop intime... Comment expliquer cela... (je vous avoue qu'après coup, je ne me souviens même plus de la question...)

Du coup, je me suis dit "on fait de la prévention au collège, on a qu'à faire venir des spécialistes pour parler de sexualité avec eux"...

On n'a qu'à... C'est ça. je vous ai déjà dit je suis très naïve.

D'abord je me suis confrontée à la réticence de mes collègues, qui avait déjà essuyé les plâtres quelques années auparavant. Puis quand je les ai eu convaincus, j'en ai parler à la direction. Ce fut un "non" catégorique "mais comment va t-on informer les familles?" était leur litanie. Pour moi, une note d'information aurait suffit. Mais il a fallu leur accord... 3 familles ont refusés. 80% ont laissé faire en précisant "de toute façon, je ne vois pas ce que ça l’intéresse, c'est un enfant dans sa tête"

Puis on m'a demandé de ne pas dire qu'on parlait de sexualité mais de "vie affective". Bon, là j'avoue que j'ai rigolé le jour de la première visite où les résidents ont demandé "les dames qui parlent d'amour et de cul".... Vive la vie affective pour les parents!!!

Et puis (cette étape là m'a quand même pris plus d'un an), il a fallu partir à la recherche d'intervenant. Donc là autant gravir l'Everest avec des crocks et un short à paillette, c'est plus simple, plus rapide et moins dangereux.... (après c'est peut être moins esthétique mais ça c'est un autre débat...)

Donc, j'ai écumé les docteurs, gynéco, associations, infirmières, sages-femmes de ma région. Bizarrement dès que je parlais de mon public, personne n'avait le temps...

Pendant ce temps là, l'ouverture de paroles engendrée par ma réponse aux questions, avait provoqué un afflux d'hormone et on voyait les couples se créer... Et ils ne faisaient pas que de se créer... ils risquaient même de procréer à ce niveau-là...

Mais selon ma direction, ce n'était pas vrai. Selon les parents ça n'existait pas.

Oui. Le monde du social est un monde aveugle...

Au printemps 2011 (deux ans après la mis en place du projet), je rencontre enfin une équipe du planning familiale qui veut bien venir nous parler. Après moult rebondissement, l'aide d'une collègue, nous parvenons à mettre en place à la rentrée 2011 des rencontres trimestrielles avec elles (soit quand même 3 ans de mise en route...)

Au centre, on n'en parle pas de cette expérience. Ni avec les familles, ni avec la direction. 

Il y a trois jours, la direction nous a même demandé d'être TOUJOURS avec les résidents. Toujours une présence à coté d'eux. Plus d'intimité. Aucune. Leurs vies c'est chez eux, le centre, le centre, chez eux. Et on ne leur permet plus AUCUN moment où enfin il pourrait s'aimer.

Alors l’assistance sexuelle, super. Vraiment j'y crois. Mais sérieusement avant ne pourrait on pas penser qu'on pourrait former des gens à parler sexualité aux handicapés (notamment déficient), à faire une grande campagne sur la protection (oui le sida se propage aussi chez eux et de façon bien plus exponentielle que dans d'autres population), et puis surtout leur dire que ça existe mais surtout qu'ils ont le droit de s'aimer.

Et puis former dans les écoles les futurs professionnels et directeurs à cette question! En trois ans de formation, pas un UV sur la question. Je remercie juste mon prof de psycho qui a tenté d'ouvrir nos œillères!!!!

De plus qu'attend t-on pour créer des lieux où les personnes handicapées (quel qu’elle soit!) pourrait s'aimer en toute discrétion! Parce qu'avant de parler du droit à la sexualité, il faudrait pouvoir parler du droit de s'aimer librement! Parce que comment s'aimer quand on est toujours sous la surveillance de quelqu'un?

Je sais que j'ai été un peu longue et je pense qu'il est difficile de croire qu'on en soit encore là en 2013. Je vous invite à lire ceci si le sujet vous interesse http://www.cairn.info/revue-lettre-de-l-enfance-et-de-l-adolescence-2008-3-page-33.htm, et même je vous invite à venir voir ce qu'il se passe dans les institutions... Vraiment...





mercredi 6 mars 2013

De l'intimité...

 7eme jour sans être sur mon atelier.

La vie d'handicapé n'est pas simple tous les jours, surtout sur le plan des relations sociales.

Soyons claire. Si je prends a situations des usagers de mon établissement. Ils sont dans leurs familles toute l'année. Il se lève le matin à la maison, le transport passe, les amène. Avec un peu de chance il y a une ou deux personnes d'un autre établissement, ils sont déposés au foyer, y travaillent toute la journée, puis à 17h00, le transport repasse, les récupère, ils rentrent chez eux. 

Aucun ne voit un autre à l’extérieur. 

Au centre, les portes donnant sur l'extérieure sont fermées à clef. Ils ne sortent qu'avec nous, ou pour aller chercher le pain ou faire une petite course. 

Paulette, par exemple vit avec son papa de 83 ans. Son papa, malade ne peut pas sortir. Pas de voiture, il faut attendre que les frères et soeurs qui vivent en province viennent pour pouvoir sortir... Les volets d'ailleurs sont sans cesse fermés car il n'a plus la force de les ouvrir. Une infirmière passe 3 fois par semaine mais c'est tout. Le simple fait de venir au centre est une respiration, une vue sur le monde. Paulette me rend souvent triste.

Je suis toujours septique devant ce paradoxe: cette enfermement qui est leur ouverture sur le monde.

Depuis que je suis arrivée, j'ai tout fait pour leur offrir des temps à eux, partageant mon enthousiasme et mes désirs professionnels, l'équipe qui m'a suivit dans mes ambitions. D'abord, je me suis battu pendant quatre ans pour trouver des professionnel qui acceptent de venir parler de l'amour, d'amitié,  de la vie sexuelle avec eux. Se mettre à leur mesure pour répondre à leurs questions. Nous avons trouvé une infirmière et un médecin, très pédagogues qui font le déplacement deux fois dans l'année pour nous rencontrer.

Et puis, j'ai parlé longuement avec chaque famille, sur l'importance de les laisser ne rien raconter. Oui, c'est le seul endroit où ils ont une intimité, un lieu à eux, alors ils on le droit d'avoir leur jardin secret. Et leur enseigner, à eux, qu'ils on ce droit de garder des choses pour eux... Et j'ai été ému le jour où la maman de Simon m'a dit "Je l'ai travaillé au corps pour savoir... Mais il m'a dit -Maman! C'est ma vie, laisse moi tranquille!-"

Et puis, nouvelle direction -directive-, nouvelle direction -de sens-, on nous demande d'être avec eux tout le temps: pendant les temps de réunion mais aussi pendant les temps de pause. Toi, l'éduc, tu vas te mettre au milieu de la salle de repos, à faire un jeu, ou à jouer à l'ordinateur avec l'un ou l'autre pour "gerer le groupe, qu'il n'y ait plus de dispute".

D'abord dans cet enfermement, ce lieu où il voit sans cesse les mêmes têtes, les mêmes façons de faire, les disputes moi perso je trouve ça plutôt sein. J'adore mes collègues mais rares sont les réunions où on ne se prend pas le choux sur tel orientation ou tel analyse. Passionnés, nous débattons sur ce qui est le mieux pour Kader ou Marie,... La tension ressort et tant mieux. Pourquoi leur éviter à eux de ressortir cette tension qui est déterminante pour leur relation sociale. Ruppert Barnes disait

« On ne se dispute qu'avec les gens qu'on aime, les autres on les ignore ou on leur fait la guerre. »

 Pourquoi pour eux, ce serait différent?

 Et puis, il y a leur amitié, leurs amours qu'ils ne vivent que là.  Ces intimités qu'ils ne peuvent échanger chaque jours qu'entre 13h et 14h...  Alors à quoi je vais servir moi au milieu de ce groupe qui se cherche, se trouve, se découvre, s'aime parfois, échange des choses qu'ils ne veulent pas échanger avec nous. 

 Je m'imagine moi, au travail, à chaque fois que je veux échanger avec un collègue, mon chef, à coté de moi, écoutant, ou pouvant entendre ce que je confis... Je crois que j'exploserais, que je deviendrais folle.

 Il me semble que cette demande de la direction est d'une violence folle. Le peu de liberté qu'on leur a laissé, on leur retire encore. Que va t-il leur rester???

A l'heure où on envisage, où on parle de mettre des travailleurs du sexe au service des personnes handicapés, on supprime la  possibilité qu'ils puissent déjà connaitre l'amour, l'amitié, le sentiment voire la sexualité avec celui qu'on aime...

 Un jour j'ai appris que le terme éducateur venait d'educaré qui voulait dire "aller vers l'exterieur"... Et petit à petit, je regarde ces portes fermés à clés, ces sites internet interdit, ces sorties qu'on ne fait plus parce qu'il faut leur donner une notion de travail qui vient à eux. Et je me dis, qu'on n'est plus des éducateurs qui les accompagnons dans la cité. Mais qu'est-ce qu'on est au juste?

 

Voilà, je viens de passer 15 minutes à chercher une photos d'illustration... "amour chez les trisomiques', "intimité chez les personnes déficientes intellectuelles"... On vous donne au choix des photos de travailleuses sexuelles, ou bien des jolis enfants trisomiques (bien blond tant qu'à faire avec de jolies joues bien roses)... En même temps si en tant que travailleur on n'est pas capables de le respecter dans nos établissements, comment le faire comprendre au monde qui l'entoure... J'ai honte.

 

 

 

 

 

  



mardi 5 mars 2013

1121 euros

6 jours sans être sur mon atelier

1121 euros. C'est exactement le smic aujourd'hui.

C'est aussi ce que gage deux de mes collègues. Ils font exactement le même travail que moi, voir plus étant donné qu'ils font certains transports. 

Ils doivent aussi écrire des rapports éducatifs, prendre en charge et mettre au travail des adultes handicapés, avoir la responsabilité de 5 personnes, rendre des comptes, des horaires, monter des projets... Un vrai travail d'éducs.

Alors qu'est-ce qui vaut les 400 euros qui séparent nos salaires? 3 ans d'études et un diplôme. Injustice totale...

Dans le social certain slogan ne veulent rien dire; "Tout travail mérite salaire...", "A travail égal, salaire égale".... Le social n'a de social que le nom....

Aujourd'hui quand je rencontre des personnes qui me demandent ce qu'il faut faire pour être éducateur je les décourage...

Le travail d'éducateur n'est pas si loin du travail médical. Nous avons des vies, voir des plans de vie entre nos mains, nous garantissons une paix sociale, protégeons d'une révolution sous-jacente, trouvons des solutions à ceux qui n'en ont pas. Nous ne faisons jamais grève, nous rebellons si peu.

Les seuls moment où vous entendez parler de nous c'est au journal de 20 h pour ces salauds d'éducs qui ont violés de pauvres enfants sur un bateau, ou par l'image du grand frère qui, oh génie de l'éducation, règle tout en 90 minutes (et avec une facilité déconcertante).

Quand je dis que je suis éduc spé, on me répond "spécialisé en quoi?"... Comme quoi notre métier est tellement méconnu qu'on ne sait même pas nous poser des questions...

Mais le vrai scandale est là. Un éducateur qui a toutes ces responsabilités gagne entre 1121 euros et 1600 euros (au bout de 6 ans d'expérience, soit 10 ans sur le terrain).

Sachant que les usagers qui sont dans ma boite (métaphore pas si loin de la réalité...) ont une Allocation Handicapée de 750 euros qui peut monter jusqu'à 950 euros grâce à toute sorte d'aide. Sachant que le RSA est à 483 euros, dites moi quel est l'interêt de venir motiver les troupes à être usées avant l'heure, à faire des heures sup, à partir 2 fois dans l'année en transferts (à être absent de ton domicile pendant une semaine), à travailler certains week-end, voire certain jours fériés, à parfois faire des nuits, à se faire parfois agresser, prendre des risques...

Je veux bien qu'on ne choisi pas son métier pour un salaire. Mais si demain on ne me pait plus je n'irait plus travailler. Alors 1121 euros par mois, c'est comme dire "votre travail c’est de la merde", c'est une insulte à ton action dans la société.

Et c'est mon premier pavé dans la mare pour la mère Cane



lundi 4 mars 2013

accompagner n'est pas conduire

5 jours sans travailler dans mon atelier

La semaine dernière, j'ai discuté du fait que je n'avais pas pu travailler dans ma salle, avec mes collègues. Eux ne voient pas les choses comme moi. Le fait de créer une organisation différente amuse les usagers et ils ne souffrent pas de la situation. Cela créé aussi une bouffée d'air, un moment différent. 

Souvent nous confrontons nos points de vue sur pleins de choses et j'aime vraiment ces échanges pleins de bon sens qui font avancer les questionnements et notre vision des choses sur notre accompagnement.

Je suis sans doute plus radical dans mes propos, mes pensées, mais je suis aussi, peut-être l'éduc qui revient le plus sur ses certitudes...

Je suis toujours partagé entre leurs bien-être, leur bonheur et les aider à comprendre ce qui ferait qu'ils seraient acteurs de leurs vies... Et je me rend compte, que, (ce cheminement est sans doute aidé par le fait qu'aujourd'hui je suis parent), c'est tout le nœud de l'éducatif: les laisser faire des choix mais les guider vers ce qui est bon pour eux, tout en acceptant que ce qu'ils choisissent n'est pas forcément le meilleur à nos yeux.Et que dans leur choix qui parfois nous parait erroné, ils finissent par être heureux.

J'ai mis longtemps à accepter que mon choix n'était pas forcément le leur, et surtout que je n'avais pas forcément raison... Au début de ma carrière, souvent, je m'énervais ou partais frustré quand un usager ne prenait pas le chemin que je lui indiquait, laissant complétement de coté leur libre arbitre, le fait que l'autre avait le droit de faire d'autre choix de se tromper, ou que moi, je puisse ne pas avoir tous les tenants et les aboutissants de la raisons de ces chemins escarpés.
aujourd'hui, j'ai compris que mon rôle est surtout de leur apprendre qu'il y a des règles de vie en société et que ça ils ne peuvent pas en déroger. Mais qu'en est t-il de leur choix de vie?
 
Prenons Anne. Anne a 45 ans, trisomique, elle vit chez sa "petite" sœur qui vit en couple. Ce couple n'a pas pu avoir d'enfant et la dorlote comme si c'était leur "petite" fille et l'avoue sans complexe. A 48 ans, Anne laisse croire à sa famille qu'elle croit au père noël, attend ses barbies et ses crayons de couleurs, et saute de joie à l'annonce des vacances en Bretagne.

Au centre Anne aime travailler. Elle a un goût particulier pour les fleurs, et en prend soin. A noël, elle réclame des montres et des bijoux.

Au début, avec Anne, j'essayais de la convaincre qu'il fallait qu'elle fasse comprendre à sa soeur qu'elle n'était pas une petite fille, qu'elle devait la traiter en tant qu'adulte. Je reprenais la famille en réunion, sur les calins, les termes "école" et les heures de couché qui était obligatoire à 9h.

Et puis, je suis allé faire une rencontre familiale chez Anne. Bien sur, la chambre rose et caricaturale de la petite fille, m'a choquée dans un premier temps... Je voyais ma bonne vieille Anne si active au centre se transformer en poupée face à sa soeur qui refusait (et le verbalisait!!!) de la voir comme une adulte. Mais je voyais Anne qui trouvait aussi cet équilibre en ces deux situations: d'un coté elle était considéré comme l'adulte qu'elle était, et profitait de ses relations amicales, et de travail au centre et en même temps, chez elle, elle trouvait de quoi la rassurer, et se reposer dans un climat de confiance.

Anne savait se satisfaire des deux. Sa vie était construite sur ces deux piliers et je ne comprenais pas trop ce que moi je pouvais y changer à part lui procurer de l'angoisse....

Anne était heureuse ainsi. Elle était parfaitement intégrée dans son quartier, avait un rôle assumé dans sa famille et défini dans la structure.... A quoi servait de changer les choses puisque ça ne dérangeait que moi finalement...

Mais, paradoxalement, peut-on tout laisser faire sous prétexte qu'ils sont bien?

Bien sur, les faire travailler, leur donner une situation, un rôle dans la société c'est important pour eux. Mais ne pas les payer pour ce service rendu, pour ce travail auquel ils ont donné du temps et de l'énergie est-ce juste? 
Bien sur ils sont heureux dans ce qu'ils font et ça ne les dérange pas de ne pas avoir d'argent... Et pour cause ils n'en ont pas notion. Est-ce que parce qu'ils sont bien et heureux dans l'endroit où ils sont, on doit ne pas les payer? Est-ce que parce qu'on leur offre un rôle dans un fonctionnement institutionnel, un rôle bien défini, on ne doit pas leur donner ne serait-ce un avantage, un dédommagement? Est-ce qu'être heureux et bien dans sa vie ça suffit? Est-ce que notre rôle s'arrête là ou doit on se battre aussi pour des droits auxquels ils n'ont pas accès, des droits pour lesquels il ne sont pas dans la capacité de se battre, au risque parfois, de les mettre moins à l'aise, plus mal dans leur vie?

Toute la complexité de mon travail est là et parfois, je dois bien l'avouer, je n'ai pas de réponse à cela..